Il y a 30 ans, le GAL assassinait Bixente Perurena et Angel Gurmindo

8022014

A cette occasion, nous reprenons l’article publié le 11 février 2012 dans le Journal du Pays Basque

 

8 février 1984 : Bixente Perurena et Angel Gurmindo étaient assassinés par le GAL

Mercredi 8 février 1984, rue Aizpurdi, Hendaye 19h50 : deux réfugiés basques Bixente Perurena et Angel Gurmindo “Stein” sont abattus de dix balles dans la tête tirées à bout portant. Le GAL  revendiquera le lendemain les deux assassinats, par le biais d’un appel téléphonique à Radio Popular. Bixente Perurena avait 37 ans, né à Oiartzun il était père de trois enfants et travaillait à Hendaye où il vivait. Angel Gurmindo “Stein” avait 30 ans. 27 ans après les deux crimes demeurent impunis.

Le début du GAL

Rappelons le contexte, en cette année 1984, quatre attentats du GAL ont eu lieu depuis octobre 1983 : la disparition des réfugiés José Ignacio Zabala “Joxi” et José Antonio Lasa “Joxean” rue des Tonneliers à Bayonne, le 4 décembre Segundo Marey est enlevé à Hendaye et libéré quelques jours plus tard, le 20 décembre Ramon Oñaederra “Kattu”est assassiné au bar Kaietenia de Bayonne et le 1er janvier 1984 le réfugié Mikel Goikoetxea “Txapela” meurt des suites d’un attentat perpétré contre sa personne quelques jours auparavant à St-Jean-de-Luz.

 Une longue série d’assassinats

L’ambiance est tendue et lourde dans le milieu des réfugiés en Pays Basque Nord en ce début d’année 1984. Quelques jours avant l’attentat qui lui coûtera la vie, Bixente Perurena remarque dans son quartier à Hendaye la présence de voitures suspectes aux alentours de son domicile. Le matin même de l’attentat en ce 8 février 1984, il se rend au commissariat de Hendaye et communique à la police les immatriculations de ces deux voitures suspectes provenant de Bilbo. Un fait non nié par la police, à l’époque. D’autres sources indiqueront qu’ Angel Gurmindo l’accompagnait ce soir là, car Bixente Perurena se sentait surveillé. L’attentat souleva une vague d’indignation d’autant plus que Bixente Perurena se sentait traqué et en avait fait part à ses proches. Un millier de personnes manifestèrent le lendemain de l’attentat dans les rues de Hendaye, la frontière fut même fermée. Le maire de la ville Raphaël Lassallette (Parti Socialiste) lira un communiqué avant la manifestation demandant la recherche d’une solution démocratique au problème de la violence en Pays Basque Sud et l’ouverture de négociations. Contacté par notre rédaction, celui qui est aujourd’hui ex maire d’Hendaye et retiré de la vie politique nous dira “souhaiter une fois pour toute ne garder aucun souvenir. Je ne veux pas commenter non plus cette époque terrible pour moi et pour les Hendayais. La période a été extrêmement mouvementée” dira Raphaël Lassallette qui avait accepté que les cendres de Bixente Perrurena et Angel Gurmindo soient gardées avant leur dispersion dans le hall de la mairie d’Hendaye. Auparavant au fronton Beltzenia un hommage fut rendu par des centaines de personnes aux deux jeunes réfugiés. Après cet attentat de 1984, le GAL continuera à perpétrer de nombreux attentats jusqu’en 1987. Le GAL sera responsable d’une trentaine de morts et de destruction de biens immobiliers.

GAL : Une affaire de plus classée sans suite

L’attentat contre Bixente Perurena et Angel Gurmindo faisait partie du dénommé cas Oñaederra. En janvier 2003 l’Audience nationale à Madrid n’a pas donné suite à l’enquête qui pointait du doigt la responsabilité dans ce dossier de trois généraux Emilio Alonso Manglano, Andrés Cassinello et Enrique Rodriguez Galindo. Par manque de preuves dira le tribunal. Deux gardes civils Enrique Dorado Villalobos et Felipe Bayo Leal déjà impliqués et condamnés pour les enlèvements et morts de Lasa et Zabala les avaient désignés comme étant les donneurs d’ordres et organisateurs du GAL. Des donneurs d’ordres qui ont agi en toute impunité, les seules arrestations effectuées ont eu surtout comme cibles des mercenaires à la solde de responsables politiques. Des responsables politiques de haut niveau qui pour très peu d’entre eux ont été condamnés à des peines importantes, mais ont passé  en réalité un temps infime en prison. Et sont aujourd’hui libres.

Béatrice MOLLE




L’assassin de Yolanda González travaille pour la police espagnole !

18032013

Il y a quelques jours, le journal espagnol El Pais a publié une enquête au sujet d’un ancien membre du Batallon Vasco Español et du parti franquiste Fuerza Nueva. Celui-ci a été condamné pour l’assassinat d’une jeune basque, Yolanda Gonzalez. Le site La Horde a récemment publié un résumé en français de cette enquête, le voici :

Reconversion chez les flics pour l’assassin de Yolanda González

Le journaliste d’El País, José María Irujo, a récemment publié les résultats de son enquête sur Emilio Hollín Moro, membre du parti franquiste Fuerza Nueva et condamné pour le meurtre d’une jeune étudiante basque…

Dans la matinée du 2 février 1980, l’étudiante basque Yolanda González Martín, membre du Parti Socialiste des Travailleurs (petite formation trotskyste) et connue pour son fort engagement au sein de son école, était retrouvée morte dans la banlieue ouvrière de Madrid, à l’âge de 19 ans. Quelques jours plus tard, le Batallón Vasco Español revendiquait cette action en assurant lutter pour une Espagne « grande, libre et unie », comme le voulait la devise franquiste. Yolanda avait été séquestrée, torturée puis assassinée de trois balles dans la tête en raison de sa supposée appartenance à l’organisation indépendantiste basque ETA. Son nom s’ajouta à la longue liste des victimes du BVE, groupe armé d’extrême-droite ayant commencé ses activités peu après l’exécution du successeur désigné de Franco, Luis Carrero Blanco, revendiquée par ETA. Entre 1975 et 1981, le BVE a assassiné au moins 32 personnes, désignées en fonction de leur appartenance, réelle ou supposée, à ETA. A partir de 1982, le BVE est remplacé par une organisation plus connue : les Groupes Antiterroristes de Libération (GAL).

En 1982, l’Audience nationale condamne Ignacio Abad, José Ricardo Prieto et Félix Pérez Ajero, membres du parti franquiste Fuerza Nueva, à des peines de 4 à 26 ans de prison. Le policier Juan Carlos Rodas ainsi que le responsable de la sécurité de Fuerza Nueva, David Martínez Loza, furent également condamnés. Mais la peine maximum fut réservée à Emilio Hellín Moro, influent membre de Fuerza Nueva, considéré comme le principal exécutant, avec 43 ans de prison.

Malgré cette lourde peine pour des faits qualifiés de « terroristes », Hellín bénéficie, en 1987, d’une permission de six jours ! Il en profite alors, à l’aide d’un faux passeport, pour s’envoler en direction du Paraguay, accueilli les bras grands ouverts par le régime dictatorial d’Alfredo Stroessner. Il y fonde le Centre d’Etudes Professionnelles d’Asunción et y forme les services secrets paraguayens à l’installation de micros et aux écoutes téléphoniques. Trois ans plus tard, suite à une enquête d’un journaliste espagnol, il est finalement extradé vers l’Espagne avant d’être définitivement libéré en janvier 1996, après 14 ans de prison, soit la moitié de la peine maximum existant dans le Code pénal espagnol1. Notons également qu’il bénéficia de jours de permissions, malgré sa fuite de 1987.

A sa sortie, il change son nom en Luis Enrique Hellín Moro et se reconvertit dans l’informatique, plus précisément dans le secteur de l’investigation criminelle et judiciaire. Son entreprise florissante, New Technology Forensics, obtient plusieurs contrats dont les plus rentables avec le Service de Criminalistique de la Garde Civile (équivalent de la gendarmerie), la Police Nationale, le Ministère de la Défense ou encore les polices autonomes basque (Ertzaintza) et catalane (Mossos d’Esquadra). Parmi ses activités : la participation à des enquêtes, la formation d’agents ou encore la participation à des procès en tant qu’expert.

L’histoire de Emilio Hellín Moro nous confirme, si besoin était, que l’Etat espagnol continue d’être imprégné de son passé franquiste, protégeant ceux qui l’ont servi. Un passé qui, en revanche, semble avoir été oublié par le Parti Nationaliste Basque (PNV, droite basque), victime de la répression franquiste pendant 40 ans et qui collabore aujourd’hui avec les ennemis d’hier. Ainsi, alors que des habitants du quartier d’origine de Yolanda González avaient réalisé une fresque murale afin de commémorer les 33 ans de sa disparition, les services techniques de la ville de Bilbao (dirigée par le PNV) effaçait la fresque. Quelques jours plus tard, dans un contexte de forte mobilisation populaire pour connaître la vérité quant au soutien dont a bénéficié Hellín Moro, une nouvelle fresque était réalisée. Yolanda, nous ne t’oublions pas ! Yolanda gogoan !

L’article complet paru dans El País (en castillan)

1 Il ne s’agit évidemment pas de plébisciter les très longues peines de prison mais, dans ce type de dossier, ce type de remise de peines est très rare. Les militants de la gauche indépendantiste basque peuvent en témoigner, encore aujourd’hui…

http://lahorde.samizdat.net/wp-content/uploads/2013/03/Gonzalez-Fresque.jpg

Source : http://lahorde.samizdat.net/?p=1551







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